Sommes-nous rien ?
Il est des jours où le ciel semble vide, les réponses absentes, et l’écho du monde trop lourd. Dans ces moments-là, une question s’impose, brutale, nue : Sommes-nous rien ? Et derrière elle, un abîme. L’impression d’être là sans raison, un battement de cœur de trop dans une mécanique immense qui ne nous voit pas, qui ne nous entend pas.
On naît sans l’avoir demandé, on grandit dans des silences qu’on ne comprend pas, et l’on se heurte à des murs que personne ne nous avait décrits. Le monde promet, mais ne donne pas toujours. Il parle d’amour, de réussite, de bonheur, mais ceux-ci glissent entre les doigts comme du sable tiède. Et alors, le doute s’installe. Peut-être que nos douleurs ne comptent pas. Peut-être que nos rêves ne changent rien. Peut-être que nous ne sommes que des passants dans un théâtre où personne ne nous regarde jouer.
La déception, cette fatigue du cœur, naît souvent de l’écart entre ce que l’on espérait et ce que l’on vit. Et dans cet écart, le sentiment d’être rien peut s’enraciner. Rien de remarquable. Rien de grand. Rien d’indispensable. Juste un souffle parmi d’autres, une vie banale parmi des milliards.
Mais si l’on est rien, pourquoi alors cette souffrance, ce besoin de comprendre, de créer, d’aimer encore ? Même le vide que l’on ressent est une preuve que l’on est quelque chose. Une absence ne peut exister que si une présence l’a précédée. Et peut-être que dans le fond, nous ne sommes pas « rien », mais simplement moins que ce qu’on espérait être — ce qui est déjà énorme.
Il n’y a pas de réponse universelle. Seulement ce cri intérieur que chacun porte à sa manière : je veux compter, même pour une seule personne, même une seule fois. Et si c’est cela « être quelque chose », alors peut-être que ce n’est pas si rien que ça.